« Rentrées numériques »
Bilan intermédiaire
Le projet de « rentrée numérique éducative » (modèle proposé au départ par l’asbl EducIT combinant une approche par école avec la formation et l’accompagnement des enseignants et un équipement adapté aux défis, c’est-à-dire un laptop par élève) se déploie dans un nombre croissant d’écoles secondaires issues de différents réseaux en Fédération Wallonie-Bruxelles, avec l’appui croissant des fédérations de pouvoirs organisateurs et des pouvoirs organisateurs (SeGEC, WBE, CPEONS, et Felsi) via leurs conseillers techno-pédagogiques.[1]
La décision positive de la Fédération Wallonie-Bruxelles de soutenir l’achat des équipements des enseignants et des élèves (à raison de 75 euros/élèves sur trois ans) et la création d’un fonds de solidarité pour aider les familles en difficulté sont des mesures positives importantes pour encourager cette transition numérique des écoles secondaires.
Environ 80 % des écoles ont ainsi choisi d'équiper leurs élèves d’un matériel coûtant autour de 300€ TVAC, les autres écoles s’orientant vers un matériel plus cher. Après déduction des 75 € pris en charge par la FWB (circulaires 7919, 8366 et 8557), le coût à charge des parents est donc généralement d’environ 225 € dont une partie est prise en charge par le fonds de solidarité mis en place dans le cadre des mêmes circulaires.
En 3 ans, 50 écoles ont déjà adopté ce nouveau modèle d’équipement « 1 élève :1 machine », permettant de faire du numérique un outil à part entière pour travailler les savoirs et compétences de toutes les disciplines, en classe comme à la maison. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 3000 enseignants ont été formés et 12.000 élèves sont à présent équipés. Pas moins de 50 écoles supplémentaires se lanceront en 2022-23... et près de 80.000 élèves seront ainsi équipés d’ici 2025 !
En effet, L’ensemble des écoles ayant opté pour le modèle “1 machine pour 1 élève” durant les précédentes années continuant à équiper chaque année leurs nouvelles cohortes d’élèves, la progression du nombre d’élèves équipés devrait être exponentielle.
La perception des acteurs
Au cours de l’année 2021, la Fondation Roi Baudouin a missionné le C.R.I.F.A.[2] en vue d’évaluer de façon indépendante les effets du projet Rentrée Numérique. Dans le cadre de la seconde édition de son enquête, la FRB a interrogé les différents publics concernés sur leur perception du projet. Enseignants, directions, élèves et parents confirment que cette perception est largement positive :
- 81,4% des enseignants ont une perception positive du projet[3]
- 87,4% des élèves sont favorables à la poursuite du projet[4]
- 95% des directions ont une perception (très) positive du projet[5]
- 81% des parents ont une perception (très) positive et 7% (très) négative[6]
- L’utilisation “fréquente” (au moins 1x/sem.) est passée de 23% à 81% en un an de projet
- Réduction significative des freins identifiés par les enseignants après 2 ans: problèmes techniques : 53% avant – 9% après ; manque de vision : 43% avant – 11% après ; manque de pratique : 43% avant – 14% après ; manque de formation : 40% avant – 13% après)
- Motivation des élèves lors de l’utilisation de l’ordinateur plutôt que d’autres supports d’apprentissage (68%) et communication plus efficace des enseignants vers les élèves (80%)
Vous pouvez accéder aux résultats synthétisés de l’étude en cliquant ici. (© Fondation Roi Baudouin / C.R.I.F.A)
Perspectives et recommandations
- Outre la formation des conseillers Techno-pédagogiques engagés par les FPO/PO, EducIT, il est pertinent de travailler également avec les équipes de conseillers au soutien et à l’accompagnement des fédérations de PO/PO. En effet, l’apport du numérique concerne aussi les conseillers disciplinaires tant dans les branches générales (mathématiques, géographie, français, langues modernes, …) que dans les cours de pratique professionnelle.
- Il faut se réjouir des initiatives de formation (prises notamment par les universités en collaboration avec des centres de compétences) qui proposent des certificats permettant d’étoffer les compétences des enseignants en matière d'intégration du numérique. Les compétences numériques devraient cependant être pleinement intégrées aux cursus de la formation initiale des enseignants.
- L’équipement “1 machine pour 1 élève” est l’un des piliers à la base du succès des « rentrées numériques éducatives ».
L’expérience montre que demander aux familles qui en ont les moyens de participer au financement de la machine contribue à faire reconnaître au jeune que l’outil qu’il a en main a de la valeur et qu’il faut qu’il en prenne soin. Aussi, cette approche s’appuie dans la plupart des cas sur une démarche de cofinancement entre les autorités publiques et les parents qui intègre:
- Une contribution des pouvoirs publics permettant de réduire le coût d’acquisition du matériel pour l’ensemble des élèves.
- Une prise en charge (quasi) complète de cette charge financière pour les familles ne disposant pas des ressources financières nécessaires pour une telle acquisition.
Malgré quelques retards jusqu’en avril 2022, les outils informatiques permettant aux écoles d’introduire efficacement leurs demandes de financement (ONEL 2) auprès de la FWB sont aujourd’hui disponibles. Ces délais ont néanmoins pesé sur l’appropriation du dispositif par les écoles et une communication soutenue est donc souhaitable.
- Afin de soutenir et d’accélérer la démarche de numérisation des écoles, il pourrait être opportun d’augmenter la part du financement public ad minima à hauteur des enveloppes budgétaires prévues annuellement par la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Par ailleurs, une complémentarité accrue entre les soutiens apportés par la Fédération Wallonie Bruxelles d’une part et les investissements régionaux d’autre part est également essentielle au déploiement effectif des projets de rentrée numérique.
En particulier, il semble opportun de mettre en phase les politiques régionales Ecoles Numériques pour les établissements secondaires de façon à ce qu’elles viennent effectivement renforcer la politique d’équipement des élèves mise en place par la Fédération Wallonie Bruxelles (par exemple en augmentant la part du financement public des machines des élèves) plutôt que de soutenir des modèles d’équipement des écoles, dont un connait les limites lorsqu’ils sont déconnectés d’un projet et d’un accompagnement pédagogiques.
Enfin, des moyens alloués aux régions dans le cadre du plan de relance pour soutenir la connectivité interne et externe des écoles gagneraient à être investis aussi en soutien de ces politiques pour ce qui concerne les écoles secondaires, sans pour autant bien entendu pénaliser les autres niveaux d’enseignement.
A travers le développement des compétences des jeunes aujourd’hui, c’est aussi les perspectives de déploiement économique des régions qui sont en jeu. Les moyens investis par les pouvoirs publics dans ces questions paraissent ainsi particulièrement pertinents.
Lire aussi : « L’opération ‘Rentrée numérique’ touchera 25.000 élèves d’ici l’an prochain », dans La Libre Belgique, le 30/06/2022 : cliquez ici
[1] Grâce aux fonds débloqués par la Fédération Wallonie Bruxelles, l’ensemble des (Fédérations de) Pouvoirs Organisateurs ont investi de façon considérable dans le développement de leurs équipes de conseillers techno-pédagogiques, passant de 2 à plus de 20 profils de ce type pour le secondaire.
[2] Le Centre de Recherche sur l'Instrumentation, la Formation et l'Apprentissage est issu du Service de Technologie de l'Éducation de l'Université de Liège.
[3] Enquête Fondation Roi Baudouin auprès des enseignants des 19 établissements ayant équipé leurs élèves depuis au moins 1 an. 310 réponses entre novembre et décembre 2021.
[4] Enquête Fondation Roi Baudouin auprès des élèves des 19 établissements ayant équipé leurs élèves depuis au moins 1 an. 1167 réponses entre novembre et décembre 2021.
[5] Enquête FRB auprès des directions d’un échantillon représentatif des 50 établissements ayant bénéficié de l’accompagnement d’EducIT. 20 réponses collectées entre novembre et décembre 2021
[6] Enquête FRB auprès des parents d’un échantillon représentatif des 50 établissements ayant bénéficié de l’accompagnement d’EducIT. 472 réponses collectées entre novembre & décembre 2021.